Sans surprise, les Kurdes sont aujourd’hui moins enclins à accéder aux demandes de Washington, qu’ils considèrent comme un allié infidèle.
Dans son numéro du 10 septembre, le magazine américain Foreign Policy écrit :
« En politique étrangère, comme dans la vie, il est toujours bon d’être bienveillant avec ses amis, car on pourrait bien en avoir besoin un jour. Le mois dernier, le secrétaire d’État américain Mike Pompeo a appelé Massoud Barzani, le chef du plus grand parti kurde au Parlement irakien, à soutenir un objectif urgent de politique étrangère : obtenir un deuxième mandat pour le Premier ministre irakien Haïder al-Abadi, bloquant ainsi une alternative soutenue par l’Iran.
Il fut un temps où la réponse de l’ex-président du Kurdistan irakien aurait été un oui automatique. Mais en octobre dernier, l’administration Trump a permis à un chef de milice chiite de mener une opération anti-kurde... Sans surprise, les Kurdes sont aujourd’hui moins enclins à satisfaire ceux qu’ils considèrent comme un allié infidèle.
Les années se suivent mais ne se ressemblent pas : en 2010, lorsque les États-Unis ont demandé à Barzani, alors président du Kurdistan irakien, de soutenir la candidature du Premier ministre Nouri al-Maliki pour un second mandat, Barzani a rapidement accepté. (C’est une décision que les diplomates kurdes et américains ont par la suite regrettée.) Et en juin 2014, lorsque le secrétaire d’État américain John Kerry s’est rendu à Erbil, la capitale du Kurdistan irakien, pour demander à Barzani de reporter le référendum sur l’indépendance, les Kurdes ont consenti à attendre la fin de la lutte contre Daech.
Avec un bloc de 50 sièges au Parlement irakien nouvellement élu (sans compter les sièges de leurs alliés sunnites), les Kurdes sont en mesure de décider qui sera le prochain Premier ministre irakien. C’est parce que les élections législatives du 12 mai dans le pays se sont soldées par un match nul entre deux factions à majorité chiite. [...]
C’est ici que les Kurdes d’Irak jouent un rôle de premier rang. Après les élections, le Parti démocratique du Kurdistan (PDK) de Barzani a formé une alliance avec l’autre grand parti kurde, l’Union patriotique du Kurdistan (UPK). Ensemble, les Kurdes ont alors passé un accord avec le plus grand bloc sunnite, l’alliance de l’Axe national, pour choisir ensemble entre les deux blocs chiites. [...] Et en tant que chef du plus grand parti kurde, Barzani est bien placé pour décider du bloc que les Kurdes rejoindront.
Le problème pour le président des États-Unis, Donald Trump, est que Barzani ne croit plus pouvoir compter sur les États-Unis. [...]
Après tout, si les Kurdes irakiens ne peuvent plus compter sur le soutien des États-Unis, il serait préférable qu’ils parviennent à un accord avec la seule puissance incontestée de la région : l’Iran. »